Comprendre les CVO dans la filière viticole : fonctionnement, enjeux et impact

30/04/2025

Pourquoi parle-t-on de « cotisation volontaire obligatoire » ?

Le terme CVO peut sembler paradoxal : comment une cotisation peut-elle être simultanément volontaire et obligatoire ? Dans le cadre de la filière viticole (et d'autres secteurs agricoles), cette appellation renvoie à un mécanisme particulier. Initialement, ces contributions sont mises en place à titre volontaire par les interprofessions, regroupant producteurs et négociants. En revanche, une fois qu'une interprofession obtient une extension d’accord du ministère de l’Agriculture ou du ministère des Finances, le paiement devient obligatoire pour l’ensemble des opérateurs de la filière concernée, qu’ils soient adhérents ou non à l’interprofession.

Ce système est justifié par une logique de solidarité entre tous les acteurs du secteur. L’objectif est que chacun contribue au financement des actions collectives menées pour défendre, promouvoir et structurer la filière. Mais cette « solidarité » impose des règles qui la rendent parfois impopulaire auprès des exploitants.

Qui décide du montant et des modalités des CVO ?

Les interprofessions agricoles, comme le Comité Interprofessionnel du Vin de Champagne (CIVC) ou l’Interprofession des Vins de Bordeaux (CIVB), sont les instances qui déterminent les montants et les modalités des CVO. Ces décisions sont prises à travers des accords interprofessionnels, où siègent des représentants des producteurs et des négociants.

Ces montants sont ensuite soumis à l’approbation du ministère de l’Agriculture, qui peut étendre ces accords à l’ensemble de la filière. Ce mécanisme vise à garantir une certaine équité et encadrement, mais n’empêche pas les contestations, notamment sur la transparence de ces montants et l’utilité des actions financées.

Quelle est la différence entre une CVO et une taxe classique ?

Contrairement à une taxe classique perçue par l’État, une CVO est collectée et gérée par des organisations interprofessionnelles privées. L’intégralité des fonds reste dans la filière et profite directement ou indirectement à celle-ci.

De plus, alors que la fiscalité publique a une vocation générale (financer des infrastructures, des services publics, etc.), les CVO ont des objectifs précis et sectoriels : promotion des vins, recherche et développement sur le vignoble, protection des appellations, ou encore défense des intérêts économiques et juridiques à l’international.

Comment les interprofessions utilisent-elles les fonds des CVO ?

Les fonds collectés via les CVO sont destinés à financer plusieurs types d’actions. En fonction des interprofessions, ces actions peuvent inclure :

  • La promotion des vins : campagnes de publicité en France et à l’étranger, participation à des salons professionnels, ou organisation d’événements pour valoriser une appellation spécifique.
  • La recherche et l’innovation : soutien à des projets scientifiques pour améliorer la qualité des vins, réduire l’utilisation des intrants chimiques ou préparer le vignoble aux défis climatiques.
  • La défense des AOP et IGP : actions juridiques pour protéger les dénominations de la contrefaçon ou des abus commerciaux.
  • La gestion de crises : soutien en cas de problèmes économiques (excédents de production, chute des prix, etc.) ou sanitaires (maladies de la vigne).

Les budgets précis et leur ventilation sont généralement publiés par les interprofessions. Cependant, certains vignerons critiquent régulièrement un manque de transparence ou des dépenses qu’ils jugent inutiles.

À quel moment une CVO devient-elle juridiquement obligatoire ?

Une CVO devient obligatoire lorsque l’accord interprofessionnel qui l’instaure est étendu par le ministère compétent. Cette extension a pour effet de rendre la contribution exigible non seulement pour les membres de l’interprofession, mais aussi pour tous les opérateurs de la filière concernée (producteurs, négociants, etc.), dès lors qu’ils se livrent à l’activité visée par l’accord.

Cette contrainte soulève régulièrement des litiges, notamment de la part de producteurs indépendants qui n’adhèrent pas aux interprofessions et ne souhaitent pas participer à leur financement.

Quels sont les acteurs concernés par le paiement des CVO ?

Dans la filière viticole, tous les opérateurs économiques peuvent être soumis au paiement des CVO :

  • Producteurs : qu’ils soient en coopérative ou indépendants, ils sont souvent les premiers à supporter ces cotisations.
  • Négociants : impliqués dans l’achat et la commercialisation des vins.
  • Transformateurs : lorsqu’ils transforment les raisins ou moûts en vin.

En résumé, tout acteur qui participe à la chaîne de valeur de la viticulture peut être concerné, à divers degrés d’implication financière.

Comment les CVO sont-elles collectées auprès des viticulteurs ?

Le mode de collecte varie selon les interprofessions, mais il repose souvent sur des étapes clés :

  1. Les coopératives ou acheteurs de raisin retiennent directement le montant de la CVO dû avant de payer les producteurs.
  2. Les producteurs indépendants fournissant eux-mêmes les déclarations demandées peuvent avoir à payer directement leur CVO à l’interprofession concernée, sur la base des volumes produits ou commercialisés.

Des contrôles peuvent être effectués pour garantir le respect des déclarations et des paiements, ce qui ajoute parfois un poids administratif aux exploitations.

Peut-on refuser de payer une CVO si l’on vend uniquement en direct ?

Il s’agit d’une des interrogations les plus fréquentes, notamment parmi les petits producteurs. Malheureusement, la réponse est claire : vendre uniquement en direct ne dispense pas du paiement des CVO si l’interprofession a obtenu l’extension d’accord.

Certains producteurs, en désaccord avec ce système, se tournent vers la contestation juridique, mais les marges de manœuvre sont limitées. Pour refuser de payer, il serait nécessaire de remettre en cause la légalité même de la décision d’extension, un processus long et coûteux.

Quelle est la base de calcul d’une CVO dans la viticulture ?

Les CVO sont généralement calculées sur la base des volumes produits ou commercialisés. Par exemple :

  • En euros par hectolitre de vin produit.
  • En fonction des surfaces déclarées (par hectare).
  • Sur une base forfaitaire adaptée aux spécificités locales.

Chaque interprofession définit ses propres critères dans l’accord soumis à extension. Il est donc essentiel pour chaque viticulteur de s’informer auprès de l’organisme dont il dépend.

Comment savoir si une CVO est applicable à mon exploitation ?

La réponse dépend de votre localisation géographique, de votre activité précise dans la filière et des décisions prises par l’interprofession de votre région ou appellation. Pour vérifier si une CVO s’applique à votre exploitation :

  • Consultez les accords interprofessionnels de votre région.
  • Informez-vous directement auprès de l’interprofession concernée.
  • Vérifiez que l’extension d’accord a bien été publiée au Journal Officiel.

En cas de doute, ou pour éviter des pénalités, mieux vaut poser vos questions à un juriste spécialisé ou à une organisation professionnelle compétente.

Pour aller plus loin : une réflexion nécessaire sur le principe des CVO

Les CVO incarnent une forme particulière de solidarité financière qui, bien que nécessaire pour le financement collectif de la filière, suscite des débats passionnés. Perçues comme injustes par certains vignerons, elles soulignent surtout les tensions autour de la gouvernance des interprofessions.

Une piste d'avenir pourrait être une réflexion collective pour renforcer la transparence et la pertinence des dépenses, afin que chaque euro dépensé réponde réellement aux besoins des acteurs de la filière viticole. Car au-delà de la contrainte, une CVO bien utilisée peut devenir un levier efficace pour défendre nos terroirs.

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