Tout savoir sur la collecte des CVO auprès des viticulteurs

30/05/2025

CVO : Qu’est-ce que c’est exactement ?

Pour comprendre la collecte des CVO, commençons par définir ce que sont ces cotisations. Les CVO sont des prélèvements instaurés par les interprofessions viticoles, comme l’Inter Rhône ou le CIVB (Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux). Ces interprofessions ont pour mission de promouvoir les produits viticoles, d’organiser des campagnes de communication, de financer la recherche ou encore de protéger les appellations d'origine protégée (AOP).

Bien que le terme "volontaire" figure dans leur nom, les CVO sont obligatoires pour tous les acteurs d’une filière dès lors qu’une interprofession est reconnue par les pouvoirs publics. Elles s’apparentent donc à une taxe professionnelle sectorielle, instaurée par décret pour garantir un financement pérenne des projets collectifs. Cependant, en pratique, ce caractère obligatoire est souvent contesté, notamment par ceux qui estiment ne pas bénéficier directement des actions des interprofessions.

Qui est concerné et pourquoi doit-on payer ces cotisations ?

Les CVO s’appliquent à tous les membres d’une filière : les producteurs (viticulteurs), les vinificateurs, les négociants, et parfois même les distributeurs. Les viticulteurs sont, bien sûr, les premiers concernés, car ils représentent la base de la filière et la source primaire de la production.

Le principe est simple : chaque acteur qui contribue économiquement à une exploitation viticole ou qui profite de la commercialisation du vin est censé participer à l’effort collectif. C’est une logique de mutualisation des moyens. En théorie, le financement obtenu à travers les CVO profite à tous via des actions comme :

  • Les campagnes de promotion des vins français sur les marchés étrangers.
  • Le soutien à la recherche scientifique pour améliorer les techniques culturales ou faire face aux maladies de la vigne (mildiou, oïdium, etc.).
  • Le renforcement de la réglementation sur la certification des vins AOC/AOP.

En revanche, beaucoup de viticulteurs remettent en question l'équité de ce système. Certains estiment que ces actions collectives ne bénéficient pas autant aux petites exploitations qu’aux grands groupes ou aux négociants.

Comment les CVO sont-elles collectées ?

La collecte des CVO varie légèrement selon les interprofessions et les régions, mais les mécanismes suivent des grandes lignes communes. Voici comment cela fonctionne, étape par étape :

1. Calcul des cotisations

Les CVO sont calculées, la plupart du temps, en fonction de deux éléments : la quantité de raisin produite ou le volume de vin commercialisé. Par exemple :

  • Pour un viticulteur, les cotisations peuvent être basées sur les hectolitres de vin mis en marché ou déclarés à l’organisme en charge (souvent l’interprofession).
  • Pour un négociant, elles dépendent du volume de vin acheté ou revendu.

Ces montants sont fixés par l’interprofession concernée, souvent à partir d’un pourcentage appliqué au prix de vente moyen ou à un tarif par hectolitre. En 2022, les cotisations varient entre 1 et 4 € par hectolitre selon les appellations et les régions (source : Agreste).

2. Prélèvement directement sur les transactions

Dans de nombreuses régions, la collecte des CVO s’effectue automatiquement lors des transactions commerciales. Concrètement, si un viticulteur vend son vin à un négociant, une part est retenue par ce dernier pour régler les CVO à l’interprofession.

Certaines coopératives vinicoles appliquent également ce système. Elles prélèvent directement un pourcentage ou un forfait sur la valeur des raisins livrés par leurs adhérents. Ce mode de prélèvement peut être perçu comme opportun pour simplifier la gestion administrative, mais il manque souvent de transparence, ce qui suscite des préoccupations.

3. Déclaration par les producteurs individuels

Pour les viticulteurs indépendants, la déclaration peut être effectuée en remplissant un formulaire fourni par l’interprofession. Les producteurs doivent indiquer leurs volumes produits ou commercialisés sur une période donnée et s’acquitter du montant correspondant.

Ce système déclaratif repose sur la bonne foi des exploitants. Cependant, il est parfois sujet à des contrôles pour éviter les fraudes ou les omissions volontaires. Les interprofessions peuvent collaborer avec les douanes et les services fiscaux pour vérifier les volumes déclarés et recouper les données.

Les questions juridiques et les contestations possibles

Les CVO ne sont pas exemptes de controverses. Leur caractère obligatoire a mené à plusieurs débats juridiques. Certains viticulteurs, estimant ne pas tirer de bénéfices directs du travail des interprofessions, ont refusé de payer ces cotisations, ce qui a donné lieu à des recours devant les tribunaux.

En 2012, par exemple, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a été saisie sur la question de la conformité des CVO au droit communautaire. La CJUE a jugé ces cotisations légales, à condition qu’elles respectent certains critères, notamment la transparence dans leur utilisation et l’égalité de traitement entre les opérateurs économiques (source : CJUE, Affaire C-677/11).

Néanmoins, les contestations continuent. En 2020, plusieurs petits producteurs de vins naturels ont dénoncé des "prélèvements abusifs" qui, selon eux, favorisaient principalement les grandes appellations aux dépens des initiatives plus artisanales.

Transparence : un enjeu clé pour les interprofessions

Le manque de transparence autour des CVO reste une critique importante. Beaucoup de viticulteurs aimeraient comprendre précisément comment sont répartis les fonds collectés. Où va cet argent ? Combien est réellement alloué à la promotion, à la recherche ou à d'autres missions ?

Certaines interprofessions ont pris des initiatives pour améliorer leur communication. Par exemple :

  • Les Assemblées annuelles rendent des rapports financiers disponibles aux affiliés.
  • Des plateformes en ligne permettent de suivre certaines campagnes financées par les CVO.

Ces efforts restent toutefois insuffisants aux yeux de nombreux exploitants, notamment ceux dont les cotisations représentent une charge disproportionnée par rapport à leur chiffre d'affaires.

Vers une réforme des CVO ?

La question d’une réforme du système des CVO revient régulièrement sur la table. Pour en améliorer l’équité et la transparence, plusieurs pistes sont évoquées :

  1. Une modulation des cotisations en fonction de la taille des exploitations.
  2. Un contrôle renforcé sur l’utilisation des fonds avec des audits indépendants.
  3. Une meilleure représentation des petits producteurs au sein des interprofessions pour qu’ils puissent faire entendre leur voix lors de la définition des actions collectives.

Cette problématique nous rappelle que si la mutualisation des moyens est essentielle pour défendre tout un secteur, elle ne doit pas se faire au détriment de la diversité et de la liberté entrepreneuriale.

Les viticulteurs que nous rencontrons expriment souvent un double besoin : être mieux informés de leurs droits vis-à-vis des CVO et savoir comment les contester si nécessaire. Chez Citoyens de la Vigne Organisés, nous continuons à explorer ces questions pour offrir des solutions concrètes et défendre une viticulture plurielle et équitable.

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